Podobne

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Ce n'est pas dans la finalité d'une visée inten-
tionnelle que je pense l'infini. Ma pensée la plus
profonde et qui porte toute pensée, ma pensée de
l'infini plus ancienne que la pensée du fini est la
diachronie même du temps, la non-coïncidence,
le déssaisissement même: une façon d'« être
voué » avant tout acte de conscience [... ] Façon
d'être voué qui est dévotion. À Dieu, qui n'est
précisément pas intentionnalité dans sa
1. De Dieu qui vient à l'idée, p. 250.
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complexion noético-noématique. [... ] L'à-Dieu ou
l'idée de l'Infini, n'est pas une espèce dont inten-
tionalité ou aspiration désigneraient le genre. Le
dynamisme du désir renvoie au contraire à l'à-
Dieu, pensée plus profonde et plus archaïque que
le cogito ¹.
Pourquoi nommer ici le désir ? Et dire en quoi
il réside ou désire résider? et pourquoi l'associer
au nom de Jérusalem, à un certain désir de Jéru-
salem ? au désirer comme désir d'y résider ?
Nous le faisons au moment de clore un dis-
cours sur l'éthique et la politique de l'hospitalité.
Car avant de tenter de répondre à de telles ques-
tions, je rappellerai cet indice: il n'est pas rare
qu'au moment de dire en quoi réside l'à-Dieu,
Lévinas évoque en Dieu l'amour de l'étranger.
Dieu serait d'abord, comme il est dit, celui « qui
aime l'étranger » 2. Démesurément, car la déme-
1. De Dieu qui vient à l'idée, p. 12. Je souligne.
2. Par exemple, après avoir nommé la dévotion de l'à-
Dieu (voir plus haut: « Façon d'être voué qui est dévo-
tion. »), Lévinas enchaîne: « Dévotion qui, dans son
dés-inter-essement ne manque précisément aucun but,
mais est détournée  par un Dieu « qui aime l'étranger »
plutôt qu'il ne se montre  vers l'autre homme dont j'ai
à répondre. Responsabilité sans souci de réciprocité: j'ai
à répondre d'autrui sans m'occuper de la responsabilité
d'autrui à mon égard. Relation sans corrélation ou amour
du prochain qui est amour sans eros. Pour-l'autre homme
et par là à-Dieu ! » (De Dieu qui vient à l'idée, p. 12-13).
Ou encore: « Mais l'engagement de ce " profond jadis "
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sure est aussi, comme la non-réciprocité qui se
décide en la mort (et c'est pourquoi le salut est
alors adieu), comme l'interruption de la symétrie
ou de la commensurabilité, le trait, le trait
d'union, si on peut encore dire, le trait d'union
qui sépare l'adieu, le trait d'union de l'à-Dieu.
Ä-Dieu au-delà de l'être, là où non seulement
Dieu n'a pas à exister mais où il n'a ni à me
donner ni à me pardonner. Que serait la foi ou
la dévotion envers un Dieu qui ne pourrait pas
m'abandonner ? Dont je serais sûr et certain,
assuré de sa sollicitude ? Un Dieu qui ne pourrait
que me donner ou se donner à moi ? Qui ne
pourrait pas ne pas m'élire ? Lévinas eût-il sous-
crit à ces dernières propositions, à savoir que l'à-
Dieu, comme le salut ou la prière, doit s'adresser
à un Dieu qui non seulement peut ne pas exister
(n'exister plus ou pas encore) mais à un Dieu
qui peut m'abandonner et ne se tourner vers moi
par aucun mouvement d'alliance ou d'élection ?
Désir, amour de l'étranger, démesure, voilà ce
que je voulais, au titre de l'Adieu, mettre en
de l'immémorial me revient comme ordre et demande,
comme commandement, dans le visage de l'autre homme,
d'un Dieu " qui aime l'étranger ", d'un Dieu invisible,
non thématisable [... ] Infini auquel je suis voué par une
pensée non-intentionnelle dont aucune préposition de
notre langue  pas même le à auquel nous recourons 
ne saurait traduire la dévotion. À-Dieu dont le temps dia-
chronique est le chiffre unique, à la fois dévotion et trans-
cendance. » Ibid., p. 250.
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exergue à cette conclusion - aux approches de
Jérusalem.
« Dieu qui aime l'étranger » plutôt qu'il ne se
montre, n'est-ce pas là, au-delà de l'être et du
phénomène, au-delà de l'être et du néant, un
Dieu qui, alors même que littéralement il n' est
pas, pas « contaminé par l'être », vouerait l'à-
Dieu et le salut et la sainte séparation au désir
comme « amour de l'étranger » ? Avant et par-
delà 1'« existence » de Dieu, hors de sa probable
improbabilité, jusque dans l'athéisme le plus
vigilant sinon le plus désespéré, le plus « dégrisé »
(Lévinas aime ce mot), le Dire à-Dieu signifierait
l'hospitalité. Non pas quelque abstraction qu'on
nommerait, comme je viens de le faire hâtive-
ment, « amour de l'étranger » mais (Dieu) « qui
aime l'étranger ».
Qui aime l'étranger. Qui aime l'étranger ? Qui
d'autre aimer ?
Revenons un instant à Jérusalem.
Rendons-nous à Jérusalem.
À Jérusalem, peut-être y sommes-nous.
Le pas d'un tel retour est-il possible ? La pos-
sibilité se mesure ici à l'effectivité d'une pro-
messe. Certes. Une promesse demeure, sa possi-
bilité reste effective mais l'éthique exige que cette
effectivité s'effectue, sans quoi la promesse trahit
la promesse en renonçant à ce qu'elle promet.
L'accomplissement d'une possibilité effective de
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l'éthique, est-ce déjà la politique ? Quelle poli-
tique ?
Nous y sommes, dans la Jérusalem terrestre,
entre guerre et paix, dans cette guerre qu'on
appelle de tous côtés sans y croire, sans nous y
faire croire, le « processus de paix ». Nous
sommes dans la promesse menacée ou mena-
çante, dans le présent sans présent, dans l'im-
minence d'une Jérusalem promise.
« Ce qui est promis à Jérusalem, c'est une huma-
nité de la Thora. », dit un jour Emmanuel Lévi-
nas.
Qu'est-ce que cela veut dire ? Qui sont les
hôtes et les otages de Jérusalem ? Comment
entendre 1'« humanité de la Thora » quand, pour
déterminer la promesse qui porte ce nom de lieu,
Jérusalem, Lévinas insiste sur la terre, la « Jéru-
salem terrestre » et non céleste, « non pas hors tout
lieu, dans de pieuses pensées » l.
Pourquoi fait-il alors signe vers un accueil qui
serait plus qu'un accueil, plus ancien ou plus à
venir encore qu'un accueil ? une hospitalité
eschatologique qui serait plus que l'hospitalité, [ Pobierz caÅ‚ość w formacie PDF ]

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